Formes électorales et conception de la communauté dans les communes italiennes (12 e -14 e siècle)

Abstract

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Introduction. L’histoire du tirage au sort en politique : instruments, pratiques, théories

“…Un mouvement parallèle s'effectue pour Rome avec les publications de Claude Nicolet (1976) et Azedine Beschaouch (1991, ou encore de Roberta Stewart (1998), et il se poursuit avec des synthèses comme celle de Frédéric Hurlet (2006). De façon intéressante, ce regain d'attention touche également l'histoire des communes italiennes, en particulier à partir de l'ouvrage majeur de John N. Najemy (1982), l'heure étant aujourd'hui à des synthèses partielles au-delà des monographies (Tanzini, 2014 ;Keller, 2014). Le mouvement s'étend à des pays non occidentaux comme la Chine (Will, 2002) ou le Mexique (Aguilar Rivera, 2000).…”

“…L'originalité de Thomas d'Aquin est ailleurs : prenant acte de la diffusion croissante du tirage au sort en politique dans les Communes italiennes et de sa légitimité en droit civil, il étend l'interdiction de la divination pour y inclure le tirage au sort des fonctions à l'intérieur de l'Église. Le contexte politique était particulier : le recours à la sélection aléatoire des charges se généralisait en Italie du Nord et du centre, dans la plupart des cas combiné avec diverses formes de cooptation et d'élection, à tel point que cette réinvention du sort politique a pu être considérée comme le principal apport procédural des Communes italiennes à l'histoire politique (Keller, 2014). La pratique avait été tolérée dans l'Église jusqu'à une date tardive 2 mais en 1223, quelques décennies avant les écrits de Thomas d'Aquin, le pape Honorius III décida d'interdire le tirage au sort dans les procédures de nomination des évêques.…”

“…La pratique avait été tolérée dans l'Église jusqu'à une date tardive 2 mais en 1223, quelques décennies avant les écrits de Thomas d'Aquin, le pape Honorius III décida d'interdire le tirage au sort dans les procédures de nomination des évêques. Deux ans plus tard, l'interdiction fut étendue aux autres charges ecclésiastiques (Keller, 2014). Alors que le recours au sort dans le domaine politique visait précisément à répartir le pouvoir et à éviter sa monopolisation par un individu ou une faction, son transfert dans la sphère religieuse serait allé à l'encontre du mouvement, entamé depuis la Réforme grégorienne, qui visait à accroître la structure hiérarchique de l'Église et l'autorité du pape en son sein.…”

Langages et pratiques du tirage au sort dans la vie publique des communes médiévales italiennes ( xiii e - xiv e siècles)

“…À Cremona par exemple, nous savons qu'en 1186, les consuls étaient élus « par compromis » (« per viam compromissionis ») (Keller, 2014b). À Pistoia, l'ancien règlement déterminant l'élection des consuls (Breve dei Consoli, 1140-1180) prévoit que les consuls choisissent dans la grande assemblée du peuple (« in aringo ») deux citoyens chargés d'élire les 14 conseilleurs (Statuti di Pistoia, 1996, p. 173-175).…”