Introduction : enjeux géographiques et politiques du football Football et politique en Tunisie 1 Si l'on se réfère à une partie des évènements qui ont conduit à la révolution dite « de jasmin » en Tunisie marquée par le départ de Zine El Abidine Ben Ali en janvier 2011, notamment les manifestations dans les stades de football, on serait tenté de dire que l'histoire du football se confond avec l'histoire de la Tunisie. C'est ce qui ressort des propos d'un « ultra » du Club Africain de Tunis : Dans le virage, c'était le bordel. Il y avait des bagarres avec la police, des fumigènes à chaque match malgré les sept contrôles de police à l'entrée des stades, des chants ouvertement anti-gouvernement. C'est en cela que les ultras tunisiens ont joué un rôle dans la révolution, parce que c'était une première en Tunisie de voir des gens résister à la police et critiquer ouvertement le gouvernement. Le seul endroit où la police n'était plus toute puissante, c'était dans le virage. Cela a eu un réel impact sur la population, surtout sur les jeunes, qui en représentent une grosse partie. C'est quand les gens ont vu les ultras aller chaque samedi au stade avec l'objectif d'en découdre avec la police, et que celle-ci était impuissante, qu'une sorte de fatalité a disparu. 1 2 Ces manifestations semblaient faire écho à celles qui avaient eu lieu avant l'indépendance du pays en 1956. L'existence d'équipes de football sur le territoire tunisien renvoie aussi à la manière dont ce sport s'est diffusé pendant le protectorat français à partir de 1881, selon des proximités spatiales, sociales et économiques mais aussi, de manière moins centrale, en fonction de la hiérarchie urbaine. De telles dynamiques ont été également étudiées dans d'autres contextes, par exemple en France (Ravenel, 1998a, 1998b, 2004) en