La nature potentiellement traumatisante du travail des enquêteurs en exploitation sexuelle et physique d'enfants (EESPE) les rend vulnérables à développer des symptômes de détresse psychologique. La plupart des études ont mis l'accent sur l'importance du soutien et de l'utilisation de stratégies d'adaptation positives pour favoriser le bien-être des enquêteurs. Or, certaines compétences interpersonnelles pourraient aussi jouer un rôle protecteur en contextes émotionnellement chargés, comme il a été démontré auprès d'autres types d'intervenants exposés au stress et à des clientèles vulnérables. Parmi ces compétences, la mentalisation, soit la capacité à comprendre ses états mentaux et ceux des autres au sein des relations, pourrait s'avérer centrale pour ces intervenants étant donné ses effets bénéfiques sur le bien-être psychologique. Considérant que les enquêteurs sont constamment en contact avec des récits ou images potentiellement traumatiques, qu'ils interagissent de façon continue avec des individus en détresse et qu'ils sont exposés à différents stresseurs, la mentalisation pourrait les aider à mieux gérer la charge émotionnelle reliée à leur contexte de travail. Cet article propose donc un regard sur les stresseurs spécifiques au travail des EESPE, les impacts sur la détresse psychologique et les facteurs de protection de leur bien-être psychologique. Un modèle théorique sera présenté, proposant la mentalisation comme étant une compétence interpersonnelle pouvant jouer un rôle dans le bien-être des EESPE. Les implications potentielles de la mentalisation pour la formation et la pratique professionnelles seront discutées.