Diverses disciplines se sont intéressées à l’anorexie mentale au cours des dernières décennies et ont proposé différents modèles pour l’expliquer. Celui qui domine actuellement, le modèle biopsychosocial, permet de comprendre comment ce problème se met en place au niveau proximal. Toutefois, une question perdure : existe-t-il une fonction biologique à ce trouble? Il s’agit de l’énigme que les chercheurs adoptant une perspective évolutionniste ont tenté de résoudre. Plusieurs hypothèses ont été proposées et celles-ci seront revues et critiquées dans le cadre de cet article. Ensuite, une hypothèse alternative, l’hypothèse de la compétition intrasexuelle pour le rang, sera présentée et visera à accroître la valeur explicative des modèles proposés. Il sera argumenté que la restriction alimentaire et les troubles qui en découlent sont des sous-produits de l’intensification de la compétition entre les femmes dans la culture occidentale moderne. Alors qu’il aurait autrefois été adaptatif pour les femmes de compétitionner avec leurs consoeurs dans le but de correspondre aux traits physiques et psychologiques jugés désirables dans leur culture, ce mécanisme serait devenu hors de contrôle dans une société dont les critères de beauté sont irréalistes, voire inatteignables, et dans laquelle la minceur est glorifiée. La perspective évolutionniste, bien que parfois méconnue, a le mérite d’amener un point de vue novateur qui stimule la réflexion théorique à un niveau d’analyse différent, mais complémentaire, à ce que proposent les approches conventionnelles.