La place qu’occupe la matière dans la définition de la substance sensible évolue au cours des livres Z et H de la Métaphysique : là où les chapitres 10 et 11 du livre Z affirment que la matière doit être exclue du definiens de la substance sensible, le chapitre 2 du livre H affirme, au contraire, qu’il se doit de l’inclure. Le présent article montrera que cette différence de doctrine est issue d’un approfondissement de la manière dont la priorité causale de la forme est exprimée dans la définition. Elle l’est d’abord, dans le livre Z, au moyen d’une réduction des termes du definiens aux seules « parties de la forme », réduction qui est d’emblée jugée superflue et insatisfaisante. Elle le sera ensuite, dans le livre H, par la position de prédicat de la matière qu’elle occupe et qui a précisément vocation à exprimer sa priorité. En ce sens, les deux ensembles de textes ne constituent pas une volte-face théorique de la part d’Aristote, mais l’approfondissement d’un seul et unique modèle de définition visant à exprimer la priorité de la forme.