La croissance et la prolifération postnatale sont des caractéristiques essentielles des myocytes cardiaques qui permettent au coeur d'adapter progressivement sa masse à la demande hémodynamique. Mais, une fois l'âge adulte atteint, l'arrêt des divisions semble être un mal nécessaire au maintien de la stabilité des fonctions électriques et mécaniques du myocarde. Les myocytes cardiaques ont-ils toutefois gardé la capacité de proliférer ? La question est, pour plusieurs raisons, loin d'être académique. Ainsi, en cas d'infarctus du myocarde, c'est-à-dire de mort par ischémie d'un certain nombre de cellules myocardiques, la capacité conservée des myocytes à proliférer permettrait d'envisager la régénération spontanée ou provoquée de la zone infarcie, en totalité ou en partie. En revanche, en cas d'incapacité des myocytes à proliférer, la fibrose réparatrice serait la seule possibilité de limiter les dégâts, et la transplantation d'un nouveau coeur, ou l'injection de cellules progénitrices, le seul moyen de rétablir la situation [1] (‹).
La capacité des myocytes cardiaques à proliférer est limitéeEn milieu de gestation, la prolifération des cardiomyocytes est de 33%, contre 2% seulement à la naissance. Karyocinèse et cytocinèse sont dissociées après la naissance et, selon les espèces, il apparaît des cellules polynucléées, binucléées le plus souvent [2], ou polyploïdes [3]. L'arrêt du cycle cellulaire est sous le contrôle de deux familles fonctionnelles distinctes de protéines kinases inhibitrices dépendant des cyclines, Ink4 et Cip/Kip, lesquelles bloquent l'activation de l'ADN polymérase [2]; peu d'informations sont disponibles sur le fonctionnement de ces deux familles d'inhibiteurs au sein du myocarde jeune ou adulte [4]. L'hypothèse d'un arrêt du cycle cellulaire a également été renforcée par le fait que la survenue d'un cancer du myocarde est exceptionnelle et, en tous les cas, jamais MEDECINE/SCIENCES 2004 ; 20 : 710-4