RésuméCet article s’intéresse au martyre du missionnaire jésuite saint João
de Brito (1647-1693) et aux débuts de son culte en pays tamoul, entre ancrage
dans des dynamiques locales et vastes horizons impériaux. Comment un jésuite
portugais, agent du catholicisme mondial moderne, est-il devenu une figure si
localement ancrée ? Et comment le dernier jour de sa vie est-il devenu le début
d’une dévotion tamoule qui dure maintenant depuis trois siècles ? Un ensemble
varié de sources permet d’aborder ces questions : les rapports, écrits en
plusieurs langues, des premières enquêtes menées dans le cadre de la
canonisation de Brito, où ses catéchistes figuraient parmi les principaux
témoins ; un traité missionnaire en tamoul ; et une vie de Brito en tamoul
écrite par l’un de ses catéchistes et conservée sous la forme d’un manuscrit sur
ôles. Deux éléments se dégagent de cette exploration. Au début du
xviiie siècle, être témoin d’un martyre était ainsi un moyen
d’acquérir un certain degré de sainteté, et donc une autorité spirituelle et
sociale transmissible au sein des lignées familiales. En outre, en assistant à
la vie et à la mort de Brito, les chrétiens laïcs tamouls ont trouvé un moyen
d’inscrire leur propre vie dans l’histoire du catholicisme à l’échelle locale et
mondiale.