À partir d’une ethnographie du travail d’éleveuses et d’éleveurs de vaches laitières, adossée à des données issues de la statistique publique, cet article explore trois dimensions de l’attachement au travail : l’absence de répit, c’est à dire la continuité du travail et des préoccupations liées au travail ; l’amour du métier, dans ses dimensions routinières, identitaires et statutaires, tel qu’il se dévoile lorsque les personnes sont forcées d’abandonner leur travail ; les obstacles à la fuite, révélés par la trajectoire de celles et ceux qui ont persisté dans un travail insoutenable. Cet article combine donc une ethnographie de l’activité et une reconstitution des carrières, et met en miroir des départs forcés et des fuites empêchées. Deux fils rouges, la santé au travail et l’endettement, permettent d’explorer les déterminations réciproques de ces différentes dimensions de l’attachement. Ainsi, on montre les effets contradictoires des problèmes de santé et de la dette, qui menacent le maintien dans le travail tout en réduisant l’éventail des sorties possibles. Enfin, l’article montre comment l’attachement se transmet, en s’intéressant non pas à la fabrique du goût pour le métier, mais à la dynamique d’enrôlement à l’œuvre dans les crises.