Les mutations communicationnelles du christianisme catholique au xx e siècle La religion et la communication pourraient paraître antagonistes en un xx e siècle occidental qui a vu fleurir la communication comme parangon de la modernité, outil d'une nouvelle gestion des affaires publiques, explicitation triomphante, diffusion de masse et mise en relation technicisée, quand le religieux pouvait paraître n'offrir qu'initiation réservée, enrôlement, culte du secret, art ancien de la parole et de l'image, rite entre soi, refus du débat public, discipline du corps, contrôle social géré au plus près. On aurait même pu penser que la rationalité technicisée étendue par la communication, au profit d'un ordre capitaliste et d'une société de la consommation, allait mettre fin à cette idéologie, lui en substituant une autre plus profitable. En réalité, la communication comme idéal, comme ensemble de techniques et d'outils, comme pratique, s'est développée dans le religieux lui-même, qui en avait pourtant conçu les prémisses, il y a bien longtemps, en développant un art particulier de produire des signes matériels et sensibles qui figurent un immatériel, source de tout pouvoir légitime et fin de toute attente, qui forment identité et communion, en façonnant de textes une image suggestive, ou en la proscrivant, en animant des rites performatifs, en donnant vie à des textes, en cultivant un art de la parole jouant des ressources du symbolique. La religion-qui avait contribué à développer la communication occidentale, comme nécessité outillée et cadrée, régulatrice du social, produisant les prémisses des industries culturelles par la production en masse de livres pieux, d'images, de cantiques, de mots à dire, d'objets de pratique individuelle et collective, de vêtements, de lieux en série, faisant exister et advenir des imaginaires nécessaires et attendus, jouant ainsi sur l'intime, le désir et l'effroi, la peine et la joie et constituant ainsi une formidable thanatotechnique narrative (Han, 2014)-se trouvait renouvelée des conceptions, techniques et pratiques communicationnelles du xx e siècle. C'est que la religion-qui emprunte les formes sociales qu'elle trouve, pour se constituer d'elles, et se poser comme ce qui forme le social en sa culture propre-a toujours su s'emparer des dispositifs de production sémiotique les plus pertinents, oscillant entre réticence/résistance et appropriation (Lagrée, 2000 ; Pinto de Oliveira, 1968). La religion a donc joué le jeu de la communication au xx e siècle, comme elle joue le jeu