<p>Depuis les années 2000, le terme « zone grise » s’est diffusé dans la littérature en sciences sociales, mais aussi dans les médias. Dans le domaine du travail et de l’emploi, la perspective des zones grises donne à voir comment les régulations du travail, et comment les pratiques individuelles et collectives forgées depuis la fin du 19ème, sont aujourd’hui aux prises avec des mutations de fond. Plus encore, cette perspective manifeste l’épuisement et les limites des catégorisations héritées du salariat pour comprendre les transformations en cours.</p><p>Ce dictionnaire invite, si ce n’est à refonder un lexique d’analyse du travail et de ses régulations, au moins à examiner de façon critique ces catégories héritées. Il a pour objet de montrer comment un grand nombre de ces catégories changent de sens sous nos yeux et permettent l’émergence de nouveaux concepts et catégories d’entendement. Historiquement, le salariat, comme « politique du travail » – au sens de logique générale d’insertion du travail dans le système démocratique – a mis en rapport un état du développement technologique, un stade spécifique de la dynamique du capitalisme, des modalités de régulation des conflits sociaux et un principe de stratification sociale. S’il est encore trop tôt pour dire quels seront à terme les contours de la « politique du travail » qui émerge aujourd’hui, ce dictionnaire vise à cartographier les recompositions qui sont d’ores et déjà perceptibles, au Nord comme au Sud, tant au niveau des régulations que des catégories mobilisées.</p><p>Rassemblant un grand nombre de sociologues – notamment du travail –, mais aussi des économistes, des géographes, des politistes, des historiens ou des juristes, principalement d’Europe et des Amériques, le dictionnaire multiplie pour cela les entrées, qu’il s’agisse d’entrées conceptuelles comme « pluriactivité », « subjectivation » ou « précarité », ou encore de figures du travail<i> </i>comme<i> </i>« intellos précaires » ou « travailleurs économiquement dépendants ».</p>