> Chez les eucaryotes, l'acide phosphatidique (AP) et le diacylglycérol (DAG) forment un couple de métabolites interconvertibles qui constitue à la fois un véritable hub métabolique, à la base de tous les glycérolipides membranaires, et un système de signalisation extrêmement versatile. Deux criblages pharmacologiques indépendants réalisés sur des cibles végétales et humaines ont conduit à l'identification d'une nouvelle classe de composés agissant sur des enzymes se liant à l'AP ou au DAG, dans des contextes biologiques qui semblaient à première vue indépendants. D'une part, chez les plantes, les monogalactosyldiacylglycérol synthases (MGDG synthases ou MGD) sont responsables de la production de MGDG, qui est le lipide le plus abondant des membranes photosynthétiques et, de ce fait, est essentiel au métabolisme et au développe-ment. Les MGD utilisent comme substrat le DAG. D'autre part, chez les mammifères, les phospholipases de type D (PLD), qui produisent de l'AP par hydrolyse de glycérolipides, sont impliquées dans des cascades de signalisation contrô-lant un large spectre de fonctions cellulaires, et jouent un rôle lors du développement des cancers. Les deux criblages pharmacologiques indépendants décrits dans cet article avaient pour objectif d'identifier des molécules inhibant, dans un cas, les MGD d'Arabidopsis, une plante modèle et, dans un autre cas, les PLD humaines. Les molécules obtenues sont dans les deux cas des dérivés des pipéridinyl-benzimidazolones, ce qui permet de proposer cette famille de molé-cules comme une nouvelle source d'inspiration dans la recherche de composés actifs sur le métabolisme des glycérolipides ; ces molécules pourraient être utiles dans d'autres contextes biologiques et thérapeutiques. >
Les vertus du hasard pour le processus d'innovationNous avons tous en tête des découvertes scientifiques, anecdotiques ou fascinantes, qui furent le fruit du hasard ayant parfois introduit des ruptures scientifiques et technologiques que les approches rationnelles ne pouvaient pas apporter. On parle de découverte accidentelle, concept introduit au XVIII e siècle par Horace Walpole sous le terme anglais « serendipity » [1]. Cette vertu du hasard peut être érigée en méthode lorsqu'on recherche de nouveaux composés actifs au milieu d'un très grand nombre de molécules testées en parallèle, allant de la dizaine à la centaine de milliers par jour pour un criblage robotisé, à des millions de structures moléculaires pour des criblages réalisés virtuellement à l'aide de logiciels [2,24] (➜). On parle d'approches sans a priori, approches qui sont considérées comme stratégiques dans le processus d'innovation. Les progrès de la chimie, de la biologie, de la miniaturisation, des méthodes de détection, de l'imagerie cellulaire, de la robotisation et du traitement des données ont permis de lancer cette aventure et d'explorer l'espace chimique pour y découvrir des composés nouveaux qui seront autant d'outils spécifiques et flexibles pour contrôler des processus biologiques subtils [3]. Parmi ces nouveaux...