“…Nul besoin de sombrer dans un fatalisme radical pour comprendre que dans cette vision du monde […] il n'est pas de place pour le hasard et la liberté, pas d'espoir de construction ou d'invention de quoi que ce soit� […] En effet, à quoi bon aider quelqu'un qui, de toute façon, et, quelle que soit la qualité de notre accompagnement, ira là où ses précédentes actions doivent le conduire ? (Beauvais, 2004, p� 105) Si une référence à la négligence apparaît à plusieurs reprises dans les recherches sur le parcours doctoral et la supervision (Devos et al�, 2015 ;John & Denicolo, 2013 ;Templeton, 2016) En plus d'une perte de repère compliquant la capacité à arrêter des choix et l'orientation du travail, les évènements bloquants sélectionnés par les doctorant•e•s de l'étude fribourgeoise comme évènements majeurs touchent au besoin d'autonomie dans sa dimension de régulation des activités et des ressources� À l'instar des résultats synthétisés dans le panorama international des recherches, la question de la pression temporelle et du « retard » est souvent exprimée, comme le montrent notamment les tendances : peu de temps pour aller en profondeur dans les activités, retard par rapport aux délais fixés de fin de thèse (souvent lié au financement du doctorat, mais également un sentiment de retard par rapport à ce qui serait normal et attendu)� Ces situations semblent être déclenchées, entre autres, par une charge de travail importante liée à l'assistanat, à des aléas dans le processus de recherche et à la manière dont les doctorant•e•s perçoivent leur rôle actuel et celui de (futur•e) professionnel•le� Cette pression dépend aussi de leur interprétation des valeurs, normes et exigences plus ou moins implicites émanant du contexte académique sur ce qu'est par exemple un•e « bon•ne » doctorant•e, chercheuse ou chercheur, en termes de délais de réalisation des activités et de productivité, d'indépendance, de droit à l'erreur, etc� La marge de manoeuvre et de liberté qui est laissée aux doctorant•e•s par leur responsable, qui est souvent aussi la•le superviseur•e de thèse, s'avère être un élément important dans la régulation des activités et des ressources� La plupart des assistant•e•s d'enseignement ou de recherche ayant participé à l'étude fribourgeoise perçoivent que l'expression de désaccord avec leur superviseur•e dans le cadre de leur mandat d'assistanat (refuser une tâche d'enseignement, etc�) ou le manque de performance (par ex� ne pas pouvoir respecter un délai pour un article) peut entraîner des conséquences problématiques pour la suite de leur parcours doctoral et parfois des possibilités d'emplois futurs� L'équilibre entre les activités d'assistanat et celles de doctorat est souvent fragilisé dans cette situation de double dépendance, au motif que celle-ci accroit l'asymétrie des rapports de pouvoirs, dans une relation où les enjeux de certification vont au-delà des activités quotidiennes� En parallèle, la forte incitation, voire la pression exercée par certain•e•s superviseur•e, à travailler de manière autonome et à se conformer à des normes souvent très implicites peut affecter la capacité des doctorant•e•s à juger et à évaluer la pertinence, la complexité, la nature ou la temporalité des actions à entreprendre (Skakni, 2018a)� Les planifications exigeantes de Nora, Rachel et Romain peuvent en être un exemple, comme la pression ressentie par Mathilde et Liz� Lorsqu'elles•ils font face à des situations de blocage et d'impuissance qui se prolongent et/ ou à des charges de travail importantes pour l'assistanat, les doctorant•e•s peuvent être amené•e•s à effectuer une priorisation de leurs activités en choisissant celle...…”