> Le lymphome folliculaire est la 2 e hémo-pathie lymphoïde de l'adulte en termes de fréquence, et, en dépit de l'introduction d'immunothérapies ciblées (dont le Rituximab 1 ) au cours des années 2000, reste un cancer incurable [1]. L'évolution préclinique est généralement indolente et insidieuse, progressant sans symptôme clinique manifeste pendant plusieurs dizaines d'années. Le diagnostic est de fait généralement tardif et le traitement instauré alors que le clone tumoral est déjà largement disséminé. Au cours des lignes successives du traitement actuel de référence (R-CHOP 2 ou équivalent), les rechutes sont quasi-inéluctables, récur-rentes, et acquièrent une résistance croissante aux traitements. Grâce au fantastique essor de la génomique, il est apparu au cours de ces dernières années qu'à l'instar de nombreuses autres tumeurs, les rechutes sont rarement le résultat de l'évolution directe des clones tumoraux présents au moment du diagnostic, mais au contraire sont issues de clones ancestraux, prétumoraux, vraisemblablement présents plusieurs années avant même l'apparition de la tumeur [2][3][4][5][6]. Par analogie avec les leucémies myéloïdes, ces entités prétumorales sont souvent assimilées au concept des cellules souches cancéreuses, bien que pour le lymphome folliculaire, la définition phénotypique et la démonstration fonctionnelle restent spéculatives à ce jour. La dissection de ces mécanismes est un défi majeur, qui 1 Le rituximab est un anticorps monoclonal humanisé dirigé contre le CD20, un antigène spécifique des lymphocytes B. 2 Le R-CHOP inclut le rituximab (MabThéra TM ), le cyclophosphamide (Endoxan TM ), la doxorubicine (Adriblastine TM ), l'oncovin TM (vincristine) et la prednisone (Solupred TM ).pourrait mener au développement d'approches curatives basées sur l'éradication des précurseurs engagés. Au niveau biologique, le lymphome folliculaire est un lymphome B mature issu de la transformation maligne de lymphocytes B des centres germinatifs. L'acquisition précoce de la translocation BCL2/IGH 3 t(14;18)(q32;q21) lors d'erreurs de recombinaison V(D)J pendant la différenciation des cellules pré-B dans la moelle osseuse, en constitue l'événe-ment initiateur (via l'activation constitutive de l'oncogène BCL2). Paradoxalement, il est désormais bien établi que des cellules porteuses de la translocation t(14;18) sont également retrouvées à faible fréquence (1 cellule/1 million) dans le sang d'individus sains, sans autre manifestation hématologique clinique (> 70 % de la population adulte) [7]. Comparé à l'incidence du lymphome folliculaire (~3-4 cas/100 000/ an), il est clair que cette translocation est nécessaire, mais non suffisante, pour le développement tumoral, et que d'autres altérations, acquises au fil du temps, devront complémenter l'activité oncogénique de BCL2 pour enclencher le développement tumoral.
Une hypothèse de travailQuels sont les mécanismes menant à l'engagement des cellules t(14;18) dans la transformation maligne ? La démonstration récente que les cellules B mémoires peuvent r...