Pseudomonas aeruginosa occupe une position centrale dans la problématique actuelle des infections nosocomiales (IN). Ce bacille à Gram négatif ubiquitaire est responsable de 10 % à 15 % de l'ensemble des infections nosocomiales, une fréquence supérieure étant rapportée chez certaines catégories de patients à haut risque : pathologies broncho-pulmonaires chroniques (notamment la mucoviscidose), immunodépression (neutropénie, syndrome d'immunodéficience acquise), grands > Pseudomonas aeruginosa est un pathogène nosocomial majeur, en particulier chez les patients atteints de mucoviscidose et dans les services de réanimation. L'augmentation actuelle de l'incidence des souches multirésistantes de P. aeruginosa (PAMR) et les phénomènes épidémi-ques locaux qui en résultent sont donc particuliè-rement inquiétants. Ces souches sont définies par la résistance à au moins trois des quatre principales classes d'antibiotiques anti-Pseudomonas (pénicillines/céphalosporines/monobactames, carbapénèmes, aminosides et fluoroquinolones). Elles cumulent constamment plusieurs méca-nismes de résistance aux antibiotiques (efflux, imperméabilité, modification du site d'action ou inactivation enzymatique), conséquences d'évé-nements génétiques multiples (mutations et/ou transfert horizontal de gènes de résistance). La pression de sélection induite par une ou plusieurs antibiothérapies préalables est le principal facteur de risque d'infection à PAMR. La colistine (polymyxine E) reste active sur la quasi-totalité de ces souches et constitue fréquemment la dernière option thérapeutique disponible, au prix d'un risque non négligeable de néphrotoxicité. L'émergence d'isolats résistants à la colistine, actuellement exceptionnelle, fait cependant craindre une évolution vers la panrésistance dans un avenir proche. < [1,3]. Si la sévérité des infections nosocomiales à P. aeruginosa est conditionnée par la virulence propre à l'espèce et par les comorbidités des patients concernés, elle dépend également de la capacité du pathogène à accumuler les mécanismes de résistance aux antibiotiques et des difficultés thérapeutiques qui en résultent. Ces résistances acquises s'ajoutent aux nombreuses résistances naturelles de l'espèce et peuvent concerner l'ensemble des classes actives sur les souches sauvages (Tableau I). La prévalence globale des souches multirésistantes de P. aeruginosa (PAMR) reste actuellement peu élevée, notamment en France, avec d'importantes variations épidémiologiques locales. Elle a cependant augmenté de façon significative au cours des deux dernières décen-nies, en particulier dans les services de réanimation [4][5][6][7]. La colistine constitue fréquemment la dernière option thérapeutique disponible pour les isolats résistants à toutes les autres molécules. L'objectif de cette revue est de synthétiser les données disponibles sur les méca-nismes moléculaires, l'épidémiologie, et les conséquences cliniques et thérapeutiques de la multirésistance chez P. aeruginosa.
Multirésistance chez P. aeruginosa : définition et mécanismesEn l'a...