En 1988, le Brésil a rédigé une nouvelle constitution afin de bâtir une nation fondée sur la démocratie, l’intégration et le multiculturalisme. Dans ce cadre et en guise de réparation des discriminations subies par les populations afro-descendantes depuis l’esclavage, l’État a accordé aux communautés, dites quilombolas, qui en étaient issues la possibilité d’obtenir un statut juridique particulier et, notamment, la propriété collective de leurs terres. Depuis 2006, ces dernières sont également considérées comme des aires protégées, réaffirmant ainsi leur rôle dans la préservation de l’environnement. Cet article décrit et interroge certains aspects de la gouvernance environnementale brésilienne à l’épreuve des communautés quilombolas qui constituent l’une des variantes d’un modèle socio-territorial de gestion déléguée, à la fois collective et locale, des ressources naturelles. Après avoir examiné la genèse de ce modèle en suivant l’évolution des paradigmes de la gestion environnementale à la brésilienne, on resituera les communautés quilombolas, acteurs-clés de ce processus, dans le contexte historique et idéologique, national et international, qui a été le leur. Les réalités contemporaines de la gouvernance environnementale seront ensuite abordées par l’analyse des pratiques qui s’exercent derrière les discours normés, celles des communautés quilombolas mais aussi celles des acteurs externes avec lesquels elles interagissent. Il sera alors possible de mettre en évidence comment l’environnement se convertit bien souvent en un instrument politique brandi diversement en fonction des paradigmes en vigueur, mais aussi des acteurs impliqués et de leurs propres intérêts, menant à certaines ambiguïtés et distorsions. Nous soulignerons ainsi comment la gestion collective des ressources et, par là même, sa durabilité se trouvent souvent aux prises avec les nécessités économiques familiales des quilombolas d’une part et les rapports de pouvoir hiérarchisés et interdépendants qu’ils entretiennent de longue date avec les acteurs politiques et économiques régionaux d’autre part.