Cet article présente l’intervention en ergonomie comme une conception organique, c’est-à-dire lorsque l’intervention a pour finalité, au-delà des transformations empiriques immédiates sur les conditions matérielles ou organisationnelles du travail, de changer les rapports de pouvoir, de dépasser les antagonismes et la compétition, en développant la coopération et les relations de confiance. À partir d’interventions dans l’industrie pétrolière et dans les coopératives de collecte de matériaux recyclables, quelques réflexions sur l’efficacité et les limites de ces interventions sont mises en avant. Il est particulièrement souligné : (i) le rôle du gatekeeper, veilleur ou traducteur entre les deux mondes, le techno-scientifique ou experts, et l’interne de l’organisation ; (ii) le rôle de l’expert externe pour construire des liens internes entre fonctions étanches ; (iii) la formation d’une équipe interne en analyse du travail comme condition d’appropriation des méthodes et de pérennisation du processus de changement enclenché ; (iv) la conception dans l’usage, prise en compte en amont et en aval du projet ; (v) l’institutionnalisation des dispositifs de REX comme espaces réflexifs et d’apprentissage organisationnel ; (vi) la place de l’analyse de l’activité dans la construction de l’intervention, son appropriation et sa pérennisation.