L'une des ambitions du présent volume est de « remettre en cause l'idée selon laquelle les exclamations sont analysables isolément et en relation uniquement avec le locuteur ». L'histoire de la grammaire permettra peut-être de comprendre comment s'est imposée cette idée, idée d'autant plus étonnante que le mot exclamation est emprunté à la rhétorique, laquelle prenait explicitement en charge la perspective interactionnelle. La notion d'exclamation est délicate à établir, elle est pourtant opératoire, permettant de saisir rapidement un grand nombre de faits et de recueillir des données. L'exclamation est répertoriée dans les grammaires, igure dans les index 1 et les tables des matières, elle a droit à sa section ou à son chapitre 2. Tout se gâte dès qu'il s'agit de la déinir, d'en saisir l'essence, la spéciicité, au-delà d'un ensemble de traits (sémantiques, prosodiques, syntaxiques, graphiques) qui ne lui appartiennent pas en propre mais qu'elle réunit toutefois. On se doute que cette stratiication, si féconde et si problématique, est le produit d'une longue histoire. Le terme même étant rare dans le vocabulaire des grammairiens de la Renaissance, nous étudierons d'abord comment la grammaire française à ses débuts prenait en charge les faits linguistiques aujourd'hui