C’est à la charnière entre les années 1990 et 2000 que de nombreux éditeurs de sciences humaines et sociales (SHS) amorcent la conversion numérique de leurs publications, en se situant dans le sillage d’une transition déjà engagée chez les éditeurs spécialisés et de STM tout en devançant d’autres secteurs comme la littérature ou les beaux livres. Toutefois, c’est lors de la décennie précédente que surgissent les premières initiatives dans un contexte de risque technique et économique très élevé et d’un relatif isolement, même au sein du sous-champ de l’édition des SHS. Pour ceux et celles qui s’emparent du numérique, l’enjeu principal est d’améliorer, d’une part, les modalités de diffusion de la connaissance et, d’autre part, les conditions de production de leurs ouvrages lesquels, adossés à une production restreinte et lente, se destinent le plus souvent à des marchés de niche. De tels projets peuvent prendre des formes variables en fonction de la position objective de la maison d’édition, des propriétés socio-culturelles et professionnelles de ceux et celles qui portent cet investissement numérique et des représentations qu’ils et elles ont de leur métier. Cet article vise donc à mettre au jour les diverses prises de position des éditeurs impliqués dans le numérique en veillant à retracer le champ des possibles qui est le leur à la fin des années 1990 tout en rendant compte de l’ajustement qu’ils opèrent entre leurs stratégies numériques et la mission de diffusion du savoir qu’ils assurent.
