Qualifiées « Cendrillon » (Pistorius & Bettina, 2011, p. 6) et faisant figure de « parent pauvre » de l’enseignement et de l’apprentissage des langues étrangères, la phonétique et la phonologie sont, aujourd’hui, de plus en plus marginalisées aussi bien dans le champ didactique que dans les pratiques de classe. Il en est de même pour la correction phonétique. Amener un apprenant à la production et la réalisation d’un son donné de la langue étrangère n’est pas toujours aisé pour l’enseignant. Jusqu’il n’y a guère, la plupart des enseignants de langue étrangère/seconde fondaient leur enseignement sur le postulat selon lequel l’apprenant prononce mal les sons étrangers parce que son appareil phonateur n’est pas habitué à les produire dans sa langue maternelle. La correction de la prononciation dans l'apprentissage d'une langue étrangère fait désormais consensus : faudrait-il rééduquer les organes articulatoires ou reconditionner la perception de l’apprenant (Alazard, 2013) afin de corriger ses déficiences de prononciation ? Un dilemme de causalité des erreurs phonétiques qui rejoint celui de « l’oeuf ou la poule » ? La présente étude expose les résultats de deux expérimentations portant sur la perception et la production de la voyelle orale [y] du français par des apprenants-enfants marocains commençant à apprendre cette langue à l’âge de 7 à 8 ans dans une école publique. Les tests de diagnostic conçus montrent que la voyelle antérieure arrondie [y] , n’étant pas attestée ni en arabe marocain ni en arabe classique, pose majoritairement des problèmes de production aux apprenants marocains. Les résultats mettent en valeur l’efficience du reconditionnement perceptif sur les performances perceptive et productive des apprenants. Ils confirment que, généralement, un bon reconditionnement de la perception des sons étrangers est une nécessité préalable à une production optimale. Ces données obtenues suggèrent qu’un entraînement basé sur la correction perceptive par la prosodie sensibilise les apprenants aux liens existant entre le respect de la structure prosodique et la bonne perception et production des sons. Cela mène à conclure qu’une surveillance de la bonne maîtrise de la structure suprasegmentale dans l’expression orale, dès le début de l’apprentissage du français langue étrangère/seconde, pourrait garantir une meilleure performance chez l’apprenant.