Le partage de l’espace et la cohabitation sociale dans les grandes villes sont soumis à différents diktats. Entre la spéculation immobilière, la revitalisation, la densification et les mouvements de populations, ce partage est souvent bousculé. Ce que les études démontrent jusqu’à maintenant c’est un partage inégal de cet espace au détriment des populations marginalisées, surtout des populations en situation d’itinérance. Pour être attractives, les villes repoussent les populations perçues comme étant indésirables au regard des activités commerciales et touristiques. Les populations en situation d’itinérance voient donc leur accès à la ville compromis principalement en raison de leur occupation de l’espace public jugée comme étant fautive. Ces populations n’ont nulle part où aller, nulle part pour disparaître. En parallèle, en matière de prise en charge des populations en situation d’itinérance, le logement est souvent placé comme la pierre angulaire de toutes les démarches d’intervention et c’est à partir du logement qu’est donc pensée la réinsertion sociale (de manière micro-sociologique) ou encore la réduction des inégalités sociales (de manière macro-sociologique). Par ailleurs, de nombreuses villes occidentales, comme Montréal (Québec, Canada) connaissent d’importantes crises du logement, rendant l’accès à ceux-ci plus difficile que jamais. Est-il alors possible, d’exister, d’utiliser, de circuler, de se rencontrer dans l’espace, sans avoir d’ancrage à un logement?
Cet article cherche à revoir, de manière inédite, les pratiques qui s’interrogent sur le vivre-ensemble, sur la cohabitation sociale, afin d’identifier celles qui contribuent davantage au bien-être des personnes en situation d’itinérance. C’est plus particulièrement en recourant aux pratiques d’aménagement (architecture, design, urbanisme) et aux pratiques d’intervention sociale (travail social, médiation, soin) que nous tenterons de déplacer notre regard pour favoriser un meilleur partage des espaces urbains.