Dans le débat sur la pertinence d’un encadrement légal de l’union libre, le législateur québécois a jusqu’à maintenant soutenu l’importance de préserver le libre choix des individus qui souhaitent vivre en dehors des cadres du mariage. Un tel argument repose sur quatre postulats quant au « choix » que font les couples lorsqu’ils prennent la décision de se marier ou non, postulats qui ne sont étayés par aucune étude empirique. En tenant compte du point de vue des couples sur la vie conjugale et à l’aide de notions de sociologie du droit telles l’internormativité, la conscience du droit et l’effectivité des lois, l’article montre que la décision des couples de se marier ou non repose en fait sur des motifs et des normes qui n’ont souvent rien de juridique, et que l’imposition d’un statut de « conjoint de fait » par les lois sociales et fiscales entretient la perception répandue mais erronée selon laquelle les conjoints de fait jouiraient, après quelques années de vie commune ou la naissance d’un enfant, d’un statut et d’une protection équivalents à ceux des couples mariés.