Le virus du Sida au milieu du gué vingt-cinq ans aprèsÉditorial > Au XX e siècle, la virologie s'est progressivement imposée comme un moyen unique pour comprendre l'immense complexité et la fragilité du vivant. À ce titre, la Rétrovirologie a été très féconde, commençant dès 1906 avec les premiers rétrovirus caractérisés, tel EIAV qui infecte les chevaux, et les virus oncogéniques ASLV présents chez les oiseaux. Ces décou-vertes ont suscité d'abord peu d'enthousiasme, avant d'apparaître comme des approches essentielles à l'analyse du vivant dans le contexte du développement des cultures de cellules et de la microscopie électronique. Nous avons assisté alors à un renouveau d'intérêt de la communauté scientifique pour ces virus et les maladies qu'ils provoquent en tant qu'agents infectieux très simples. Citons les découvertes de rétrovirus infectant les rongeurs (MLV) causant cancer, leucémie et dégé-nérescence du système nerveux central, et les petits ruminants (Visna/CAEV) chez qui l'infection virale provoque pneumopathie et arthrite. Au cours de la deuxième moitié du XX e siècle, des découvertes et innovations majeures vont profondément marquer la recherche en biologie et médecine, citons la restriction d'hôte chez les bactéries et pour les enzymes de restriction conduisant à l'avènement de la biologie moléculaire, le clonage et l'amplification d'ADN, le séquençage et l'analyse structurale des macromolécules du vivant, avec, par voie de conséquence, une recherche planifiée et accélérée de nouvelles molécules médi-caments et de nouveaux vaccins. C'est dans ce contexte prodigieusement dynamique et novateur que les hypothèses et les découvertes se succèdent en rétrovirologie, comme celle du provirus par H. Temin -inspiré par l'étude des bactériophages -qui conduit à découvrir l'ADN polymérase ARN dépendante, ou transcriptase inverse (RT) [1,2], une enzyme clé de la réplication des rétrovi-rus, et dont les utilisations en génétique, biotechnologie et médecine sont devenues incontournables ; c'est aussi la découverte remarquable des oncogènes et proto-oncogènes [3,4] qui régulent le développement, la prolifération et la survie ou la mort des cellules, et qui a ouvert un immense champ dans les domaines de la recherche fondamentale et de la médecine. Et l'humanité dans tout cela ? Plus on recherche ces virus, plus on en découvre présents, des oiseaux aux singes, y compris sous la forme dite de rétrovirus endogènes constituant une part importante du génome, de la levure à l'homme. La découverte du VIH-1 (virus de l'immunodéficience humaine-1) fut le fruit d'une collaboration remarquable entre deux équipes, une de cliniciens, et une de chercheurs fondamentalistes à Paris. C'est en exploitant au mieux les dernières technologies de culture de cellules, de biologie moléculaire et de séquençage d'ADN, que les premiers clones moléculaires du VIH-1 voient alors le jour en France et aux États-Unis. Ces clones seront rapidement utilisés pour produire des réactifs indispensables au diagnostic de l'infection VIH-1, car elle se ré...