Le blogage ou l’arme de second rang des outsiders du champ journalistique. Le cas des dessinateurs de presse

Abstract

Fr.
 
 
 
 Si les recherches sur les effets d’Internet sur le travail journalistique sont nom- breuses, on ne compte en revanche que très peu d’études sur l’effet d’Inter- net sur les dessinateurs de presse. Or, force est de constater que l’espace du dessin de presse fournit un vaste terrain d’enquête au sociologue intéressé par le travail journalistique, surtout à un moment où il subit deux épreuves concomitantes : la crise de la presse d’un côté, et la montée en puissance d’Internet dans le travail des journalistes de l’autre. C’est pourquoi cet article s’attache à analyser les effets de l’arrivée d’Internet dans les pratiques professionnelles des dessinateurs. Les dessinateurs de presse constituent dans l’ensemble une catégorie relativement précaire parmi les journalistes : la crise de la presse, la concurrence de la photographie ou encore l’isolement causé par leurs conditions de travail hors des rédactions compliquent grandement l’exercice de leur métier. C’est pourquoi certains d’entre eux se sont saisis d’Internet, et de l’écriture des blogs en particulier, afin de tenter de surmonter quelques-unes de leurs difficultés professionnelles. À travers cette étude, nous cherchons donc à voir en quoi les blogs contribuent ou non à renouveler les pratiques de la profession. Plus précisément, notre interrogation est la suivante : le blog permet-il aux dessinateurs – et notamment à ceux qui sont dominés dans le champ journa- listique – d’améliorer sensiblement leurs trajectoires et positions professionnelles ? A partir des réponses des dessinateurs à un questionnaire en ligne, d’entretiens avec eux, mais aussi de l’analyse de leurs blogs, nous montrons que le blog devient pour cette population à la fois un nouvel instrument de promotion de leur travail et un outil leur permettant de s’intégrer dans leur communauté professionnelle. Le blogage reste cependant une arme de second rang pour les dessinateurs, qui ne leur permet pas de renverser les hiérarchies établies dans l’espace journalistique.