Tour carrée de 9,62 m de côté (à l'intérieur), s 'élevant jadis jusqu'à 25 m, et constituée à l'origine
d'un sous-sol surmonté d'un seul étage, le donjon du château de Montrichard est un exemple important de l'architecture domestique et militaire du XIIe s. On sait qu'un hall (aula) et une tour (turris) ont été bâtis en ce lieu en 1109-31, mais la destruction attestée de la turris fortissima (" tour très forte " ou " la plus forte tour ") de Montrichard en 1188 a conduit à considérer le donjon actuel comme le hall plutôt que la tour. Cependant, un examen de l'édifice montre que le mur est et une grand partie du mur sud ont été intentionnellement détruits et reconstruits ; comme les détails architecturaux de la structure d'origine et des ouvrages ultérieurs peuvent se rapporter à une construction située respectivement vers 1125 et vers 1200, on peut reconnaître dans le donjon la turris de 1109-30, endommagée mais non détruite en 1188, et réparée peu de temps après. Cette identification précise entraîne deux conséquences, en dehors de l'étude même de Montrichard. D'une part, elle permet d'écarter largement la conclusion tirée de l'interprétation traditionelle de Montrichard - considérant des édifices similaires comme des "halls" autrefois accompagnés de tours depuis longtemps disparues. D'autre part, elle permet d'explorer les véritables implications de sa construction cum aula, et vient renforcer l'idée, découlant de l'architecture de cet édifice et de plusieurs autres, que les donjons à une pièce par étage différaient fondamentalement dans leur fonction, leur échelle et leur conception, du type que résument, par exemple, la Tour Blanche de Londres ou Falaise, qui possédaient plusieurs pièces à chacun des niveaux supérieurs (deux ou plus). Tout en présentant quelques-uns des attributs de défense et de parade propres aux structures plus grandes, ces donjons n'étaient pas conçus comme des résidences complètes, mais fournissaient tout au plus une partie des aménagements dans un ensemble plus vaste. L'identification du second bâtiment de Montrichard comme une aula renforce l'idée que le premier était normalement destiné à un logement privé plutôt qu'à la réception du public.