Champs de vision, horizontal et verticalDans le paysage marin, tel que conçu -et construit -par les Anciens, l'horizontalité l'emporte sur la verticalité : il est structuré par des réseaux de circulation et de visibilité, des aires d'échange ou de contrôle, des distances et des temps de parcours, des points de repère, des zones de contact sur l'interface littorale et bien d'autres éléments encore 1 . Cet espace, d'abord perçu en plan, n'est pas totalement dépourvu de profondeur : une connaissance en est nécessaire aux activités humaines, que ce soit pour l'exploitation des ressources fauniques aquatiques (Theodoropoulou 2011a et 2011b) ou pour la navigation à proximité des côtes (connaissance des récifs immergés, des hauts fonds). Les hommes maîtrisent toutefois peu cette dimension verticale, tant elle reste difficile d'accès.Sur le plan visuel, pour commencer : en mer, le regard peut porter à 360 degrés, sans rencontrer d'obstacle ; de loin, il est possible d'apercevoir des repères, ou une destination, de surveiller de larges étendues. En direction du fond, le regard se perd très vite. La limite est certes fluctuante : selon la luminosité, la texture de la surface (calme ou agitée) et le degré de transparence de l'eau, les fonds sont plus ou moins discernables ; de la côte, ou d'une embarcation, il est possible de se faire une idée de la zone infralittorale, de sa topographie et de ses biotopes. Mais même dans des conditions optimales, les profondeurs se dérobent à la vue 2 . Depuis la surface, on peut éventuellement les percevoir « à l'aveugle », par l'entremise de la sonde employée sur les bateaux (Oleson 2008), ou des filets, nasses et dragues des pêcheurs.Peu visible, le monde sous-marin se laisse encore moins visiter. Comparons la navigation et la plongée. Si la première requiert des aptitudes et des savoirs bien spécifiques, une bonne partie des conditions de vie terrestre sont toutefois maintenues à bord d'un navire : l'homme y utilise les mêmes capacités sensorielles et motrices que sur terre. Cela permet d'ailleurs à des personnes ignorant tout de la mer d'embarquer.