Dans le contexte du Paléolithique supérieur, la techno-économie des industries lithiques s’est concentrée sur l’étude des systèmes de mobilité. Les dimensions sociales et économiques des systèmes de production lithiques n’ont jusqu’ici été considérées qu’à la marge, ceci en raison d’une difficulté à discriminer les différentes modalités d’acquisition et de circulation des matériaux dans l’espace. À partir de données issues de sites de l’Épigravettien récent de Provence, de Ligurie, de Toscane et des Marches et en fondant nos analyses sur un solide référentiel pétroarchéologique, nous esquissons la trame d’un modèle de structuration territoriale, pouvant être décrit par au moins deux niveaux distincts. Le niveau inférieur correspond à des circulations de matériaux intenses, multidirectionnelles et multipolaires, sur des distances pouvant atteindre 300 km. Il définit deux unités : l’arc liguro-provençal et la Toscane. Le niveau supérieur est défini par une circulation unidirectionnelle depuis l’Italie centrale vers les deux unités précitées. À partir d’une analyse techno-économique des assemblages nous proposons d’interpréter le premier niveau d’organisation comme la matérialisation de territoires étendus (espaces de mobilité) et le second comme la trace d’une fraction d’un territoire social à plus large échelle. La mise en regard de ce territoire – ou réseau – social et de l’espace épigravettien italique conduit à s’interroger sur les relations entre réseaux de transferts matériels et diffusions de normes et traditions techniques aboutissant à la définition des entités chronoculturelles en préhistoire.