En partant des données collectées pour mes recherches doctorales entreprises au Gabon, et dans la continuité des études menées en sciences sociales sur la sorcellerie et la folie, je me propose d’analyser de façon réflexive ma posture de chercheuse et la manière dont les relations d’enquête influent sur la construction de mon objet. En considérant qu’au Gabon, et en particulier dans le contexte culturel du Bwiti [l’invisible] fang, les processus thérapeutiques conçus pour soigner la folie véhiculent et confortent une certaine vision de la dangerosité des fous, cet exercice réflexif est ici l’occasion de saisir ce sentiment d’angoisse que la présence des fous suscite chez moi, et l’impact de cette émotion puissante sur la conduite de ma recherche. La réflexivité proposée ici consiste à montrer comment la gestion de cette peur a révélé la part intime que cette expérience des fous met au jour, du fait de ma proximité culturelle et familiale. Surtout, elle a montré comment cette peur m’a contrainte à considérer ces échanges émotionnels comme des matériaux à exploiter, au-delà des données d’enquêtes recueillies au sein du village thérapeutique Endedang Ening.