En 1998, le ministère de l'Aménagement du territoire et de l'Environnement, devenu depuis ministère de l'Écologie et du Développement durable, lançait un programme national de recherche intitulé Politiques publiques et paysages : analyse, évaluation, comparaisons. Celui-ci était justifié par des interrogations sur l'effet réel du développement récent d'actions publiques, mises en oeuvre à différents niveaux et visant à la prise en compte du paysage, et sur l'adéquation du système législatif et ré-glementaire correspondant. Il s'agissait de rassembler les connaissances scientifiques sur la conception et la mise en oeuvre de ces actions, d'évaluer les effets sur le paysage de toute politique, qu'elle soit spécifiquement dédiée à cet objet ou qu'elle ait des effets indirects sur celui-ci. Ce programme a permis de financer vingt-quatre projets de recherche et a été à l'origine de deux colloques organisés successivement à Bordeaux, en décembre 2004 1 , et à Saint-Malo, en octobre 2005. Il a constitué un moment fort pour la recherche sur le paysage en France, non seulement parce qu'il a créé une nouvelle dynamique dans ce champ de recherche, mais aussi parce qu'il a significativement renouvelé le questionnement.Cet article a pour objectif de resituer ce programme dans son contexte scientifique et d'en indiquer les principaux apports. Après une évocation rapide de l'historique des recherches dans ce champ, nous analyserons le contexte à la fin des années 1990. Nous examinerons ensuite quels étaient les attendus du programme, avant d'en présenter un bilan rapide et les principales conclusions.Auteur correspondant : daniel.terrasson@bordeaux.cemagref.fr 1 Voir dans ce numéro, dans la rubrique Vie scientifique, le compte rendu du J.-P. Deffontaines.
Rappel sur l'évolution de la recherche sur le paysage en FranceIl peut sembler paradoxal de traiter d'une situation scientifique nationale, alors que les sciences se déve-loppent dans un contexte d'échanges internationaux. Sans sous-estimer l'importance de ces influences, nous ne les aborderons pas ici ou seulement de façon marginale. D'une part, cela nous conduirait à des développe-ments trop longs, d'autre part, ce choix se justifie par l'existence en France d'une évolution suffisamment spé-cifique de l'approche du paysage pour mériter une analyse autonome.Le paysage, une notion historique de la géographie Depuis P. Vidal de la Blache au début du XX e siècle, le paysage a toujours été présent dans les études géo-graphiques, sans toutefois représenter un concept central de cette discipline. Au départ, c'est un instrument, « un objet que l'on peut lire depuis une perspective fonctionnelle (reflet à la fois des processus à l'oeuvre dans le monde naturel et de la marche des sociétés) ou depuis une perspective archéologique » (Claval, 2001). C'est à la fois la traduction concrète des rapports homme-milieu et un moyen de mettre en évidence les différenciations régionales.Pendant toute la première moitié du XX e siècle, un courant important de la géographie humaine s'intéresse à la...