Le système éducatif français, fondé sur le modèle républicain, a fait de la culture écrite le socle de sa culture scolaire. Paradoxalement, depuis le début de ce XXI e siècle, les programmes et les discours institutionnels insistent sur la nécessité de faire une large place aux pratiques orales. De plus, Internet et les nouveaux médias numériques (tutos, forums, podcasts, réseaux sociaux…) contribuent à faire de l'oralité un vecteur croissant du savoir. Ainsi voit-on se développer dans notre société et de façon accrue des concours oratoires, des injonctions éducatives à développer et à entraîner les élèves de plus en plus à l'exercice de l'oral bien que toutes les certifications reposent aujourd'hui encore, principalement sur l'écrit. Cette contradiction interroge aujourd'hui les fondements d'un idéal scolaire républicain français fondé sur un lien oral /écrit en tension. L'histoire des idées éducatives montre qu'il a toutefois existé une pensée alternative à la centralité de l'écrit au coeur des pratiques scolaires, notamment chez cet anthropologue et pédagogue du XX e siècle, M. Jousse. Nous présentons ici ce théoricien de l'oralité qui a montré combien la synchronisation (la combinaison, l'interaction) parole et geste est efficace dans le processus de mémorisation. 2 Scientifique méconnu mais toutefois précurseur des théories orales, il a marqué et influencé des philosophes et linguistes de renom tels que : J. Goody, W. J. Ong ou encore C. Hagège et M. Merleau-Ponty. Si nous nous intéressons à cet anthropologue atypique, c'est parce que ses travaux oubliés sont réhabilités par les recherches actuelles, telles que les neurosciences qui valident bon nombre de théories de M. Jousse et notamment, ce lien étroit entre oralité et mémoire.