Les mitochondries, des organites de morphologie longtemps méconnueLes mitochondries ont été identifiées il y a plus de cent ans par microscopie photonique, mais on a longtemps ignoré leur véritable morphologie et leur nature dynamique. Le nom qui leur a alors été attribué, dérivé du grec mitos (fil) et chondros (grain), reflétait l'hétérogénéité de leur morphologie. La microscopie électronique révéla ensuite qu'elles sont entourées de deux membranes (externe et interne) et possèdent un troisième système membranaire : les crêtes de la membrane interne [1]. Ces clichés de microscopie électronique, dévoilant des structures punctiformes qui ressemblaient, en taille et en morphologie, à leurs ancêtres les bactéries, conduisent une partie de la communauté scientifique à considérer les mitochondries comme de petites entités indépendantes. Ce concept pose des questions fondamentales en termes de génétique mitochondriale. Les génomes mitochondriaux coexistent-ils dans un seul compartiment ou sont-ils isolés dans des centaines de mitochondries indépendantes ? Les mitochondries peuvent-elles réaliser des échanges moléculaires leur permettant de se complémenter ? La redécouverte et la caractérisation de la morphologie et de la dynamique mitochondriales permettront de répondre à ces interrogations. Le développement de nouvelles techniques de microscopie (microscopie électronique à tomographie, microscopie confocale) vers la fin du XX e siècle révéla à nouveau que les mitochondries peuvent adopter une structure punctiforme ou tubulaire. Dans les années 1990, des cribles génétiques menés chez la levure Saccharomyces cerevisiae ont conduit à l'isolement de mutants dont la morphologie des mitochondries était altérée et à l'identification des premières protéines impliquées dans la dynamique mitochondriale [2]. S. cerevisiae présente un réseau mitochondrial filamenteux qui résulte d'un équilibre dynamique entre deux forces antagonistes de fission et de fusion ( Figure 1A, B). Dans des conditions normales, l'équilibre fusion/ > Les mitochondries sont des organites dynamiques qui se déplacent, se divisent et fusionnent continuellement. L'équilibre fusion-fission détermine si elles forment, dans la cellule, des filaments interconnectés ou apparaissent comme une collection de structures ponctiformes indé-pendantes. Les machineries de fusion et fission sont conservées des levures aux mammifères et comprennent trois GTPases de la famille des dynamines : Dnm1/DRP1 (nomenclature levure/ homme pour dynamin-related protein), impliquée dans la fission, et Fzo1/MFN (mitofusine) et Mgm1/OPA1 (optic atrophy 1), requises pour la fusion. Alors que l'identification et la caractérisation des acteurs de la dynamique mitochondriale, de leur mécanisme d'action, de leurs fonctions et de leur régulation continuent à être l'objet de nombreuses recherches, la pertinence de ce processus est attestée par son rôle dans le fonctionnement mitochondrial, la survie cellulaire, le développement embryonnaire et son implication dans des maladies neurologiques. <