Les maladies chroniques constituent aujourd'hui les pathologies dominantes de notre société (Amrous et Barhoumi, 2012 ;Baszanger, 1986 ; Chassaing et coll., 2011 ; Lhuilier et coll., 2007). L'Organisation mondiale de la santé (OMS) définit la maladie chronique comme : « toute maladie qui engendre des problèmes de santé nécessitant une prise en charge continue sur plusieurs années, voire plusieurs décennies » 1 . Les pathologies chroniques couvrent une grande variété d'affections, de sévérité variable et fluctuante, généralement à évolution lente. Elles ont en commun un traitement au long cours et, en cela, elles affectent la qualité de la vie quotidienne. Elles sont liées au vieillissement, au mode de vie et à des prédispositions génétiques. Elles se distinguent des maladies aiguës par leur chronicité, l'alternance de périodes critiques et de périodes de stabilité et l'imprévisibilité de leur évolution. Elles n'impliquent pas nécessairement, comme lors des maladies aiguës, une suspension de la vie professionnelle. , 15 millions de personnes, soit 20 % de la population, sont atteintes de maladies chroniques. Parmi elles, les plus sévèrement atteintes, soit 7,5 millions de ces personnes, disposent d'une prise en charge en affection longue durée (ALD). D'après l'OMS, les maladies chroniques sont responsables de 63 % des décès dans le monde ; en 2030, elles seront la cause de 69 % de tous les décès, contre 59 % en 2002. Les progrès de la médecine ont permis une amélioration de l'espérance de vie de cette population, ainsi que la possibilité pour elle, grâce à des traitements adéquats, d'envisager un maintien ou un retour à l'emploi. Pourtant, son taux d'activité professionnelle en France est de l'ordre de 35 %, ce qui constitue un risque quatre fois plus grand que pour la population générale d'être exclu du marché du travail. La plupart des maladies chroniques ont un impact sur la participation à l'emploi, mais les conséquences sur l'activité varient en fonction de la nature de la pathologie et du poste occupé. Par la rupture biographique qu'elles engendrent (Bury, 1982), elles amènent fréquemment les individus à des réorientations professionnelles, et sont l'occasion de repenser leur inscription dans le monde du travail et donc leur projet professionnel. Ce travail de réorganisation dans un contexte de transition subie s'avère particulièrement complexe.
3Des chercheurs du Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture (FQRSC) observent que les transformations du monde du travail ainsi que l'augmentation des personnes présentant des problèmes de santé appellent une réflexion renouvelée sur les modalités d'accompagnement de ces sujets dans leur cheminement professionnel. La finalité est-elle l'adaptation des individus au poste de travail, ou bien la mise en place d'environnements propices à leur bien-être ?
4Dans cette lignée de questionnement, nous nous sommes intéressée aux processus de construction du projet professionnel des personnes souffrant de pathologies chroniques : nous nous sommes interrogé...