Résumé. Il a souvent été remarqué que les adjectifs du français en fonction épithète peuvent soit être antéposés, soit postposés, à leur nom recteur (cf. Delbecque (1990), Gil et al. (2012), Radatz & Stammerjohann (1996), Scarano (2005). Cette mobilité de l'adjectif suscite des interrogations aussi bien d'un point de vue syntaxique que sémantique (cf. Waugh (1976), Forsgren (1978, Abeillé & Godard (1999)). J. Goes (1999), notamment, s'est inspiré de Larsson (1994) et de Blinkenberg (1933 pour défendre et développer l'idée selon laquelle les adjectifs antéposés seraient « désémantisés », c'est-à-dire sémantiquement réduits (Blinkenberg), et de ce fait compatibles avec une plus grande variété de noms supports (Larsson). En nous aidant d'un corpus électronique de français écrit de 5 millions de mots, constitué de 50 oeuvres du domaine public de 50 auteurs différents, et étiquetés par catégories grammaticales, nous avons cherché à tester la prédiction selon laquelle l'antéposition des adjectifs aurait pour corrélat une plus grande distribution lexicale des noms supports. À la lumière de nos recherches, il s'est avéré que, contre toute attente, la diversité lexicale des substantifs est moindre dans les séquences à épithète antéposée, et que certains substantifs présentent des affinités ou des résistances avec la qualification en antéposition ou en postposition.Abstract. It has often been noted that attributive adjectives in French can be placed before or after the noun they qualify, a fact which has given rise to many inquiries from both a syntactic and a semantic point of view (cf. Waugh (1976), Forsgrén (1978, Abeillé & Godard (1999) inter alia). J. Goes, in particular, following Larsson (1994) and Blinkenberg (1993) has defended and developed the idea that pre-nominal adjectives are "desemanticized", i.e. semantically reduced (Blinkenberg) and thus compatible with a larger variety of nouns (Larsson). Using a 5m-word corpus of written French, made up of 50 different works by 50 different authors (late 19th-early 20th centuries), tagged for POS, the prediction that prenominal position would be correlated with a greater lexical variety of nouns was tested. Further research will show whether these tendencies should be interpreted in terms of lexicalisation (i.e. Adj-N or N-Adj collocations), or whether they reveal underlying mechanisms belonging to the syntax-semantics interface.