La recherche de la conciliation de la logique de création avec la logique d’entreprise n’est pas chose nouvelle dans le secteur des arts et de la culture. Cette problématique concerne aussi bien les artistes-entrepreneurs que les dirigeants des espaces collaboratifs culturels et créatifs. Nous nous intéressons à leur questionnement commun : comment articuler création, efficacité économique (en tant que système de production de ressources) et gestion (en tant qu’outil de production de ressources) ? Pour y répondre, l’approche par les paradoxes est pertinente car elle analyse la façon dont les organisations considèrent et gèrent les demandes contradictoires et conflictuelles. À partir du cas de l’espace culturel la Friche la Belle de Mai à Marseille nous proposons de caractériser les tensions entre les deux logiques et d’identifier comment les acteurs tentent de les gérer. Les données empiriques utilisées dans cette recherche ont été recueillies au cours d’une recherche-action sur le terrain d’une durée de 12 mois. 31 entretiens semi-directifs individuels ou collectifs d’une durée moyenne de 2 heures chacun avec trois catégories d’acteurs : directeur, président et employés de la SCIC ; résidents ; sociétaires ont été menés et analysés. D’un point de vue de la connaissance, notre recherche illustre concrètement des cas de paradoxes qui nourrissent la tension des logiques économique vs créative, et complète les travaux sur les paradoxes en proposant la notion de « paradoxes paradoxaux » dans le cas des espaces collectifs créatifs. D’un point de vue managérial, nos résultats nous amènent à conseiller les animateurs des espaces tels que la Friche la Belle de Mai, à intégrer cette notion de paradoxes paradoxaux, ce qui va les amener à accompagner les acteurs dans leur gestion des tensions.