Cet article propose un état des lieux des débats autour du potentiel critique de la conception rawlsienne de la justice pour la gouvernance de l’entreprise, et de la façon dont ce potentiel a été exploité depuis une vingtaine d’années. Il met en évidence deux entrées d’inspiration rawlsienne dans la question de la gouvernance, l’une institutionnaliste, l’autre centrée sur l’idée de l’entreprise comme agent porteur d’obligations de justice. Pour chacune, il précise les éléments de continuité et ceux qui relèvent d’un rapport critique à la doctrine rawlsienne. Ces deux approches débouchent sur des recommandations pratiques distinctes. L’approche institutionnaliste va dans le sens d’une participation des salariés aux organes de gouvernance. La notion d’entreprise porteuse d’obligations va plutôt dans le sens de l’intégration de membres externes représentant une raison publique dans un nouveau conseil. Ces options et leur articulation sont au cœur des débats contemporains sur la gouvernance d’entreprise.