De manière plutôt surprenante, il existe assez peu de recherches d’histoire sociale ou de démographie historique sur la pratique du divorce en France à la fin du xix e siècle et au début du xx e . Sur les banlieues, le silence est total alors qu’elles offrent un cadre singulier pour le recours au divorce, surtout à partir de la seconde moitié du xix e siècle qui voit son explosion. Il s’agit en effet de territoires marqués par un fort brassage de population, par un encadrement religieux souvent plus relâché et par un travail féminin important. Cet environnement mérite une étude spécifique, dans le cas présent à partir du cas des périphéries parisiennes à travers deux communes : Ivry-sur-Seine et Noisy-le-Sec. L’analyse porte tout d’abord sur les renseignements statistiques établis à l’époque par la Statistique générale de la France et le service de la statistique municipale de Paris : il en ressort un niveau de divortialité globalement supérieur à la moyenne nationale, mais inférieur à celui de Paris même, niveau en outre marqué par d’importantes variations entre communes banlieusardes. L’article compare ensuite, à Noisy-le-Sec et à Ivry, les caractéristiques au mariage (états matrimoniaux, âges, origines sociales, géographiques et culturelles, présence de l’entourage, etc.) des hommes et des femmes qui ont divorcé à celles des conjoints qui sont restés mariés : en passant en revue les facteurs, présents lors du mariage, qui ont pu accroître ou au contraire restreindre à court ou moyen terme le risque d’une rupture d’union, nous cherchons à tester nos principales hypothèses sur le rôle du détachement communautaire (mobilité, arrivée dans un cadre social en transformation rapide, réseau parentélaire local réduit, etc.) que le cadre banlieusard, dans sa diversité, serait susceptible de favoriser.