Cet article repose sur les matériaux récoltés pendant une observation participante, conduite entre 2016 et 2019, dans une association féministe. Pendant la durée de l’observation, la race et la classe ont joué un rôle important non seulement dans l’intégration de nouveaux et nouvelles membres, mais aussi dans la division du travail associatif. Ces dynamiques, largement impensées, ont cependant commencé à faire l’objet de discussions collectives au fur et à mesure de l’appropriation d’un ethos militant, qualifié par les enquêtées elles-mêmes d’« intersectionnel ». Cette prise de conscience, et l’amorçage d’un travail collectif de « déconstruction » des normes de blanchité, ont pris la forme d’une journée de formation antiraciste. Mais ce processus, comme tous les processus de dénaturalisation, n’est pas allé sans tensions, car la conscience de l’oppression, l’acquisition de concepts universitaires ou l’intégration d’un habitus réflexif peuvent aussi être utilisées comme des outils de résistance au changement.