théorise dans un article à valeur de manifeste 3 un genre littéraire méconnu, auquel il donne le nom de « merveilleux-scientifique ». Au sein de cette nébuleuse vont graviter un certain nombre d'auteurs de littérature dite populaire (Guy de Téramond, André Couvreur, Octave Béliard, Gustave Le Rouge, Maurice Leblanc, Jean de La Hire, etc.), jusque dans les années 1930, quand René Barjavel et Régis Messac donneront une impulsion différente à la « conjecture romanesque rationnelle 4 ». L'intrigue des récits qui appartiennent à cette école se déroule dans le monde connu du lecteur, à l'exception d'une loi physique, chimique ou biologique qui est modifiée, extrapolée ou inventée pour formuler une hypothèse féconde : bien que les prémisses de cette dernière soient fausses, la suite du récit est conduite selon un déroulement logique parfaitement crédible. Guy de Téramond met ainsi en scène un homme au regard radiographique, après une contamination au radium 5 ; Gustave Le Rouge envoie son héros sur l'inhospitalière planète Mars 6 , à bord d'un bolide mu par l'énergie psychique de milliers de fakirs ; Octave Béliard narre les ambitions démesurées d'un savant, autoproclamé dieu d'une peuplade minuscule, née à la suite d'expériences en partition cellulaire 7 . Ces récits paraissent tant sous la forme de romans, chez Jules Tallandier, Pierre Lafitte, Ferenczi et Fils, et Albert Méricant, que sous la forme de feuilletons, dans les revues Je Sais tout et Lectures pour tous, ou encore dans la presse, dans Le Matin ou L'Intransigeant. Si la collection « Les Récits Mystérieux », éditée entre 1912 et 1914 par Albert Méricant, est celle qui se rapproche le plus d'une collection spécialisée, l'étiquette « merveilleuse-scientifique » n'a jamais été apposée sur le moindre ouvrage et les récits paraissent, relativement dispersés, sous la bannière des « romans Un miroir déformé du temps présent Revue d'histoire culturelle, 1 | 2020