Une revue de la littérature a montré récemment que les patients souffrant de douleurs chroniques (DC) présentaient, en comparaison à la population générale, davantage d'idées suicidaires (IS) (20 %), de tentatives de suicide (5 % à 14 %) et environ deux fois plus de suicides complétés [11]. L'objectif de la présente étude était d'examiner les IS chez les patients souffrant de DC et d'explorer quels sont les facteurs pouvant être impliqués dans la présence des IS, et ce, en portant une attention particulière aux caractéristiques de la douleur, aux cognitions, à la santé physique, au bienêtre psychologique, aux habitudes de consommation et aux variables sociodémographiques. La collecte de données a été réalisée auprès de 88 patients souffrant de DC qui ont été recrutés consécutivement dans 3 cliniques universitaires de traitement multidisciplinaire de la douleur au Québec. Les patients ayant accepté de participer à l'étude ont complété une batterie de questionnaires dûment validés de type autoadministré (voir Tableau 1). Les résultats descriptifs obtenus sur le questionnaire d'IS [2,6] montrent qu'environ 27 % des patients ont pensé sérieusement à se suicider, en comparaison à 4 % des Québécois dans la population générale [3]. Aussi, 21 % des patients présentaient ou avaient déjà eu un plan concret alors que 5 % affirmaient avoir fait une tentative de suicide depuis qu'ils souffraient de DC. Une première série d'analyses préliminaires (t-test et X 2 ) a été effectuée sur 26 variables indépendantes dans le but de véri-fier leur association avec la question #9 de l'Inventaire de dépression de Beck [1], qui a été dichotomisée « avec IS » ou « sans IS » (voir Tableau 1). Par la suite, 5 régressions logistiques linéaires ont été réalisées sur les variables significatives afin d'examiner les facteurs pouvant être associés aux IS chez les patients souffrant de DC. Les résultats pour le premier ensemble de variables montrent qu'un score plus élevé à la sous-échelle d'impuissance de l'Échelle de dramatisation face à la douleur [9] était l'unique facteur significativement associé à la présence d'IS (R 2 =0,10; OR=1,17 ; 95 % CI : 1,05-1,31 ; p=0,005). Pour ce qui est du bien-être psychologique, les résultats obtenus révèlent que le score de dépression au CESD-R [5] n'était pas un prédicteur d'IS mais que les scores à l'échelle sommaire mentale du SF12v2[12] étaient significativement associés à la présence d'IS chez les patients souffrant de DC (R 2 =0,28; OR=0,84 ; 95 % CI : 0,77-0,91 ; p<0,000). Les difficultés de sommeil selon l'Index de la qualité du sommeil de Pittsburgh [4] étaient le seul facteur significatif sur l'ensemble des variables de santé physique associées à la présence d'IS (R 2 =0,12, OR=1,29 ; 95 % CI : 1,09-1,53 ; p=0,003). En ce qui a trait aux habitudes de consommation, les patients qui rapportaient utiliser des drogues illicites pour soulager leur douleur était 5 fois plus à risque d'avoir des IS en comparaison de ceux qui n'en consommaient pas (R 2 = 0,11, OR=5,41 ; 95 % CI : 1,73 ; p=0,008). Des résu...