La lutte, bastion de masculinités, offre un contexte significatif d’observation et d’analyse des inégalités entre hommes et femmes dans une pratique sportive. L’examen de l’intégration de la lutte féminine comme discipline olympique, en septembre 2001, contribue à saisir les rapports hiérarchiques entre styles de lutte, et par là entre sexes. La lutte féminine a en effet été construite comme style spécifique – basée sur le mythe d’une fragilité des femmes – au regard des deux styles réservés aux hommes : la lutte libre et la lutte gréco-romaine. L’analyse des archives du Comité International Olympique (CIO), de la correspondance entre la Fédération Internationale des Luttes Associées (FILA) et le CIO, et des procès-verbaux de réunions et commissions de ces institutions, combinés à des entretiens avec des acteurs et actrices de la FILA des années 1990, éclairent les tensions, les enjeux sportifs et d’égalité qui traversent l’accession au statut de discipline olympique. Ainsi, le processus d’olympisation de la lutte féminine témoigne des difficultés de la FILA à dépasser le système de pouvoir se fondant sur les rapports hiérarchiques entre les styles et ce, dans un contexte où le CIO détient un pouvoir de persuasion, voire de contrainte, sinon d’orientation des politiques sportives, particulièrement dans la perspective de plus d’égalité.