médecine/sciences> Les neurosciences cognitives ont permis d'importantes avancées dans la compréhension des fondements biologiques de notre moralité. Mais la dissociation qui existe souvent entre les actions et les jugements moraux qui les précè-dent reste inexplorée. Des indices font penser que le jugement moral serait différent du choix comportemental parce qu'il n'implique pas de consé-quences personnelles directes. Les protocoles souvent utilisés qui reposent sur des dilemmes moraux devraient donc être distingués selon que les questions portent sur un jugement objectif sans conséquences : « est-il acceptable de ? » ou un choix comportemental avec conséquences personnelles potentielles : « accepteriez-vous de ? ». En effet, ce changement de référentiel impliquerait des processus cognitifs différents et pourrait donc constituer un paramètre essentiel de l'étude de notre moralité. < probablement neurale entre les processus conduisant à un jugement moral et ceux conduisant au choix comportemental effectif.
Lien entre morale et fonctionnement cérébralLes philosophes puis les psychologues se sont aussi divisés sur la nature de notre sens moral comme processus émotionnel non rationnel ou au contraire cognitif raisonné. S'appuyant sur les travaux de Piaget [1], Kohlberg a proposé un modèle du développement du raisonnement moral en six stades [2] dépendant du développement des capacités de raisonnement de l'enfant. Mais cette vision ignore largement l'importance des émotions dans le processus psychologique aboutissant au jugement moral. À la lumière de la biologie de l'évo-lution, l'étude des comportements animaux a depuis suggéré que les émotions conduisent les individus à prêter attention au bien-être des autres et à coopérer [3]. Les émotions seraient ainsi à l'origine de la moralité humaine. Dans ce courant émotiviste, Haidt a proposé en 2001 le modèle « intuitionniste social » [4] selon lequel nous voyons une action ou nous entendons une histoire et nous éprouvons alors un sentiment d'approbation ou de désapprobation, une intuition chargée d'affect, dans laquelle le dégoût a un rôle primordial. Aujourd'hui, les neurosciences cognitives permettent d'approfondir encore l'étude du phénomène moral. Bien que n'ayant pas pour objectif spécifique d'explorer la cognition morale, les neuropsychologues L'élucidation de la faculté à différencier le bien du mal a alimenté les réflexions de la philosophie, de la psychologie et, depuis quelques années, des neurosciences cognitives. Cette discipline a permis des avancées inté-ressantes dans la compréhension de la morale. Cependant, il semble qu'elle ignore largement un élément essentiel de la moralité humaine : la connaissance des règles morales ne conditionne pas toujours les comportements qui y ont trait. Nous nous autorisons fréquem-ment de petits écarts de conduite que notre jugement réprouve, et les transgressions les plus immorales sont bien souvent conscientes. Le lien entre d'une part, notre capacité à déterminer ce qui est bien ou mal, et d'autre part nos choix compor...