Résumé -Dans un contexte de forte urbanisation, la situation insulaire de la Réunion rend complexe la gestion des déchets et incite à trouver des solutions de valorisation. L'épandage des boues de station d'épuration des eaux usées sur la canne à sucre fait l'objet de plusieurs demandes d'autorisation qui sont sources de conflits. L'enjeu d'une plus forte territorialisation des activités agricoles, dont témoigne l'épandage des déchets urbains, perturbe aujourd'hui le rapport entre producteurs et usinier. Cet enjeu différencie nettement le niveau local (agriculteurs, acteurs communaux) du niveau régional (filières, profession agricole, administrations) en termes de prises de position institutionnelles. Ce processus de territorialisation n'est pas nouveau, car il s'inscrit dans des transformations beaucoup plus globales de la société, amorcées avec la départementalisation de l'île en 1946. Sur le plan agricole et sous l'impulsion de la réforme foncière des années 1960, ces transformations se sont d'abord traduites par l'émergence d'une agriculture familiale directement liée à la filière agro-industrielle sucrière au détriment de la grande propriété foncière. Plus récemment, la montée en puissance des enjeux territoriaux et environnementaux et leur prise en compte par les agriculteurs témoignent de la capacité de la société réunionnaise à s'affranchir progressivement de ses anciennes logiques.Mots clés : Réunion (Île de la) / canne à sucre / recyclage des déchets / territoire / société Abstract -Waste recycling and social dynamics in the transition from rural to the peri-urban in Reunion Island. In a context of rapid urbanization, the insularity of Reunion Island makes waste management complex and calls for finding recycling solutions. Official requests for authorizing the spreading of sewage sludge on sugarcane are a source of conflict. The concern of a stronger territorial integration of agricultural activities, as illustrated by the spreading of urban waste, now disturbs the relationship between sugarcane producers and the sugar industry. This issue clearly differentiates the local (farmers, actors of the municipalities) and regional (agricultural production sectors, agricultural profession, administrations) institutional positions. This process of territorial integration is not new because it is part of the much broader changes in the society, initiated with the departmentalization of the island in 1946. In agriculture, following the land reform of the 1960s, these transformations first resulted in the emergence of a family farming directly bound to the agroindustrial sugar sector, at the expense of large landownership. Then, from the sugar sector logic to today's territorial and environmental issues seized by farmers, this new agriculture of Reunion Island demonstrates the ability of the society to reformulate its concerns by gradually replacing obsolete frameworks.