Même si la vulnérabilité constitue une des pierres angulaires de l’accès à la protection et aux services d’aide humanitaire pour les personnes réfugiées, elle fait rarement l’objet d’une définition en dehors du sens commun - le risque de subir un préjudice - et de son usage comme outil de mesure de la précarité socioéconomique. Cet article propose d’élargir les contours de cette notion en s’appuyant sur une recherche empirique ancrée dans l’approche théorique féministe transnationale (Mohanty, 2003; McLaren, 2017; Zeweri, 2017) qui visait à documenter les expériences d’un groupe de femmes réfugiées considérées comme particulièrement vulnérables puisque détenant la responsabilité du soutien financier et des soins du quotidien de leur famille (HCR, 2014). Des entrevues de type récits de vie ont ainsi été effectuées avec 12 femmes réfugiées en provenance de Syrie détenant la responsabilité principale du soutien leur famille au Liban (7 femmes) et au Québec (5 femmes). Le cadre conceptuel de la vulnérabilité ambivalente (Oliviero, 2016) est mobilisé afin de faire ressortir la complexité des sources de difficultés, d’opportunités, de continuités qui caractérisent les expériences des femmes en contexte de migration forcée. L’article conclut avec la nécessité d’ancrer les pratiques de recherche et d’intervention auprès des personnes réfugiées dans des cadres conceptuels et méthodologiques dynamiques, inclusifs et solidaires qui permettent de placer au centre la voix des premières concernées et une prise en compte élargie de leurs expériences en contexte de migration forcée.