L’intensification de l’élevage a transformé les territoires au cours du temps. Elle a induit des effets susceptibles de persister pendant des décennies. Ils influencent le niveau actuel de fourniture de services rendus par l’élevage. Nous proposons une analyse de l’intensification de l’élevage sur le territoire français entre 1938 et 2010 et de ses conséquences sur la fourniture actuelle de services socio-économiques et environnementaux. Deux bases de données, construites à la résolution des départements métropolitains, ont été mobilisées. La première nous sert à caractériser les trajectoires d’intensification de l’élevage sur la période 1938-2010 à partir d’indicateurs socioéconomiques, d’occupation du sol, et de productivité animale. La seconde mesure le niveau actuel de fourniture de services environnementaux, culturels, et de vitalité rurale rendus par l’élevage à la société. L’analyse du processus d’intensification débouche sur l’identification de quatre trajectoires, parmi lesquelles deux correspondent à des territoires où l’élevage joue encore un rôle majeur. La première trajectoire se distingue par une intensification prononcée des productions de monogastriques et d’herbivores qui a donné lieu à des changements majeurs en termes de productivité, de densité animale, ainsi que d’intensification de la surface fourragère. Cette trajectoire est associée à un bouquet de services combinant services de vitalité rurale et culturels. La seconde trajectoire se distingue par une spécialisation de la production d’herbivores couplée à des niveaux modérés de productivité. Cette trajectoire est associée à un bouquet de services révélant une synergie entre services environnementaux et services culturels. L’analyse des deux bouquets montre un antagonisme entre certains indicateurs de vitalité rurale et de services environnementaux, soulignant ainsi une intensification excessive de certains territoires compromettant leur capacité à fournir des bouquets diversifiés de services. Notre analyse suggère enfin que les services observés actuellement dans les territoires sont le reflet du niveau d’intensification atteint bien avant 2010.