Cet article expose la manière dont des employés ont résisté à un espace collectif imposé par la direction d’un grand groupe, lors de la construction de son nouveau siège. En privant cet espace de leur présence régulière ils l’ont empêché d’émerger en tant que lieu à part entière, le transformant ainsi en un non-lieu. Grâce à une méthodologie originale alliant recherches dans les archives de l’organisation, entretiens et observations terrain, nous avons été en mesure de mieux appréhender les mécanismes de résistance spatiale à l’œuvre. A partir de cette observation, nous avançons l’idée que le concept de non-lieu de Marc Augé (1992) devrait être davantage mobilisé en sciences de gestion car il offre une grille de lecture particulièrement pertinente à une époque où les organisations multiplient les espaces collectifs censés fédérer les employés, coller davantage à leurs envies, et optimiser leurs compétences. A travers la mise en place d’une méthodologie mêlant observations non-participantes, étude documentaire et entretiens les auteurs proposent l’analyse d’un échec organisationnel dans la mise en place d’un nouvel espace de travail. Le cas étudié par les auteurs donne à voir différentes pratiques de résistance face à un espace imposé qui devait devenir un lieu de première importance. Pour les auteurs, il serait pertinent de mobiliser davantage ce concept de non-lieu dans les recherches en sciences de gestion consacrée à la spatialité, dans la mesure où celui-ci éclaire sur une pratique de résistance spatiale.
Cet article expose la manière dont des top managers d’un grand groupe bancaire se sont comportés face à l’exécution d’un projet d’aménagement spatial majeur, lors de la mise en fonction du nouveau siège social de leur organisation jusqu’à faire échouer le projet d’entreprise qui le sous-tendait : à savoir, construire un bâtiment abritant l’ensemble de leurs services centraux et capable de favoriser les échanges formels comme informels entre les individus de ces différents services, de sorte à faire émerger plus de collaboration et un plus grand esprit de corps. A partir d’une revue de littérature pluridisciplinaire alliant la géographie sociale, la philosophie et les sciences de gestion, et en mobilisant une méthodologie croisant des entretiens avec les acteurs clés du projet et de nombreux documents internes conservés aux archives de l’organisation (tels que des comptes-rendus de réunion et des publications internes), les auteurs de cet article ont été en mesure de remonter aux raisons profondes de la défense des privilèges symboliques des top managers : préserver leur place personnelle au plus près de la Direction Générale, quitte à mettre à mal le projet d’entreprise qu’ils devaient pourtant porter et soutenir, ce qui montre l’importance que revêt cette dimension spatiale pourtant peu explorée. A partir de ce constat, nous avançons l’idée que le concept de place – dans le sens d’espace à soi localisé dans l’organisation – devrait être davantage exploré car il est essentiel dans le vécu organisationnel, et pour cela nous proposons de nous appuyer sur la géographie sociale.
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