En Afrique de l’Ouest, les entreprises artisanales de collecte et de transformation du lait ont connu un essor sans précédent depuis les années 1990. Cet article vise à analyser les raisons de cet engouement mais aussi d’en mesurer les limites. Sur la base d’exemples pris notamment au Sénégal et au Mali, les auteurs montrent que la réussite des minilaiteries est à nuancer sur le plan de l’économie nationale. Elle l’est davantage encore sur le plan social, en particulier dans la profitabilité de ces opérations pour les populations pastorales initialement ciblées.
Depuis 30 ans, le développement des industries laitières urbaines a bouleversé l’organisation du commerce des produits laitiers en Afrique de l’Ouest. Répondant à une demande urbaine en forte croissance, elles ont suscité la croissance rapide des importations de poudre de lait bon marché. Pourtant, l’élevage laitier local a connu depuis 15 ans d’importantes transformations qui remettent en cause ce modèle industriel « déconnecté » de la production locale. Les mutations de l’élevage laitier ouest africain sont liées à l’apparition, à la fin des années 1990, de minilaiteries artisanales et industrielles tournées vers la collecte de lait local. Pour répondre à ces nouveaux débouchés, les systèmes d’élevage paysans (pasteurs, agropasteurs ou agroéleveurs) se sont engagés dans des systèmes laitiers semi-intensifs basés sur la complémentation alimentaire des vaches laitières. Parallèlement, un nombre croissant d’étables urbaines et de fermes laitières se sont développées à proximité des centres urbains, sur des modèles parfois plus intensifs. Face à la concurrence de la poudre de lait importée, ces nouveaux acteurs des filières laitières se sont positionnés sur des segments de marchés valorisant l’origine locale des produits. La constitution de ces nouveaux circuits de collecte et de transformation entraîne progressivement des évolutions dans les politiques de développement laitier. De nouveaux modes de régulation des échanges apparaissent, encouragés par la mise en place d’instances de concertation entre l’Etat et les acteurs privés. Ces nouvelles options concernent la remise en cause progressive des politiques d’ouverture des marchés, la promotion de modèles techniques d’élevage moins coûteux en intrants, et la mise en place de dispositifs participatifs de gestion de la qualité des produits au sein des filières.
Par sa faculté à se développer dans des espaces restreints ou dans des milieux agro-écologiques difficiles, l’élevage constitue une opportunité pour une très grande diversité de groupes sociaux dans presque tous les milieux géographiques. Objet de nombreux échanges économiques, sous forme de troc ou d’échanges monétaires, l’élevage génère aussi des prestations sociales sous forme de dons, d’héritages ou de confiages. L’activité d’élevage permet ainsi dans de nombreux contextes la structuration de réseaux sociaux qui participent à la solidarité et à la sécurité des groupes humains, et constitue un facteur important de renforcement des actifs économiques et du capital social des familles. L’élevage est ainsi un objet complexe aux rôles multiples qui constituent autant d’atouts ou d’opportunités pour les éleveurs. Mais cette multifonctionnalité explique aussi que l’élevage soit au cœur de nombreux enjeux de développement pour les régions, à l’interface entre les objectifs de sécurité alimentaire et les objectifs de développement humain, environnemental et sociétal. Le rôle de l’élevage est ainsi l’objet de controverses qui s’expriment notamment au niveau des familles d’éleveurs, mais aussi au niveau des économies locales et nationales. Cette revue du rôle de l’élevage dans les sociétés du Sud montre en quoi l’élevage constitue un moyen de lutte contre la pauvreté dans des milieux agro-écologiques ou sociaux contraints sans pour autant négliger le
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