Pourquoi et comment l'Union africaine a-t-elle adopté en 2003 une norme juridique visant à interdire les mutilations génitales féminines (MGF) alors même que ces dernières font encore l’objet de controverses dans les États concernés, la lutte contre ces pratiques étant parfois perçue comme une cause « occidentale » ? L’analyse se centre sur les acteurs et sur les arguments qu’ils ont utilisés dans l’entreprise de production de cette norme juridique régionale. Il s’avère que l'adoption du protocole de Maputo ne s'explique pas tant par un souci de conformité à des injonctions internationales que par la mobilisation d'un « réseau de plaidoyer régional » doté de compétences juridiques propres. Cette coalition de différents types d’organisations qui avaient sur cette thématique des intérêts communs a joué un rôle de « passeur » et de traducteur de la norme au niveau régional. L’approche adoptée ici vise à réintégrer l'analyse de l’échelle régionale dans les recherches sur la production, la diffusion et la circulation de normes transnationales en matière de droits humains.
RÉSUMÉ: Cet article étudie le rôle des acteurs non-gouvernementaux dans l’adoption, la ratification, la domestication et la mise en œuvre du Protocole additionnel à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits des femmes (Protocole africain relatif aux droits des femmes), adopté en 2003 par l’Union africaine. Si cet ensemble normatif coercitif est au premier regard une ‘cause sans mouvement’ – les initiateurs et les rédacteurs du Protocole africain relatif aux droits des femmes sont en grande majorité issus des professions juridiques et se distinguent par une expertise reconnue sur les questions d’égalité entre hommes et femmes - ce texte fait rapidement l’objet d’une intense campagne de mobilisation. Cette campagne est qualifiée de ‘mobilisation juridique’ car les acteurs qui y prennent part recourent au ‘langage du droit’ pour construire et publiciser leurs revendications.
TITLE AND ABSTRACT IN ENGLISH: The role of non-state actors to legally mobilise in favour of the African Women’s Rights Protocol ABSTRACT: This article examines the role of non-state actors in the adoption, ratification, domestication and implementation of the Protocol to the African Charter on Human and Peoples’ Rights on the Rights of Women in Africa (African Women’s Rights Protocol), which the African Union adopted in 2003. If this binding normative framework is, at first sight, an advocacy initiative without any social movement supporting it, the initiators and drafters of the Women’s Rights Protocol mostly have a legal background and distinguish themselves through expertise on the issues of gender equality. This campaign is called ‘legal mobilisation’ because the actors involved take advantage of the ‘language of the law’ to build and publicise their demands.
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