Si les espaces ruraux anglais ont été largement explorés par les chercheurs, les espaces « naturels » protégés ont été marginalisés dans la littérature (Richard, 2017). Pourtant, étudier le processus de gentrification rurale dans ces espaces est pertinent dans la mesure où le Royaume-Uni est un pays densément peuplé (Richard, 2009) ce qui conduit à rendre les espaces « naturels » extrêmement attractifs pour des « middle classes » à la recherche d'un cadre de vie riche d'aménités environnementales (Marsden et al., 1996 ; Murdoch, Lowe, 2003). De plus, les espaces protégés anglais ont été depuis longtemps habités et façonnés par l'homme (Blunden, Curry, 1992 ; MacEwen, MacEwen, 1989) et sont particulièrement idéalisés et investis de forts sentiments d'appartenance identitaire (Bailoni, 2012). Par conséquent, le fait de La gentrification rurale d'une Area of Outstanding Natural Beauty (AONB) : ma...
D. Smith et al. (2018) ont récemment proposé d’appliquer au contexte britannique le concept de « wilderness gentrification » (Darling, 2005), appelant les chercheurs à poursuivre les recherches empiriques sur ce sujet. Cet article entend précisément répondre à cet appel. En s’appuyant sur un travail de terrain réalisé dans le parc national de Dartmoor de 2016 à 2018, il s’agira tout d’abord d’analyser la pertinence du concept de wilderness gentrification dans les parcs nationaux anglais. Les entretiens semi-directifs réalisés auprès des nouveaux habitants installés dans le parc national ont permis de corroborer l’hypothèse d’une wilderness gentrification à travers l’analyse des représentations qui justifient leurs stratégies résidentielles. S’il s’agit bien de la quête d’une wilderness à l’anglaise qui a poussé ces nouveaux habitants à venir s’installer dans les espaces étudiés, la mise en pratique de ces représentations se traduit par le développement d’initiatives de ré-ensauvagement qui s’inscrivent dans le mouvement du rewilding. Incarnant une nouvelle vision de la gestion de la nature dans les parcs nationaux anglais, ces pratiques individuelles et collectives, varient selon les échelles et les espaces (Taylor, 2005; Lorimer et al., 2015; Sandom et Wynne-Jones, 2019). Si ces nouvelles pratiques tendent à cristalliser des tensions, notamment entre les propriétaires des communs à Dartmoor, elles impulsent des réflexions nouvelles relatives à la manière d’intégrer ce nouveau mode de gestion pour le parc national.
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