L’élaboration d’une base de données muséale donne lieu à la transformation des relations entre informations, objets et personnes, et à la création de nouveaux liens. Cet article étudie la reconfiguration des collections du musée du quai Branly, amorcée en 2001 avec l’informatisation des données et l’indexation des objets au sein du dispositif de classement « TMS objets ». Les conservateurs valident les informations qui sont accommodées par les responsables de la base de données. Les logiques informatiques et de conservation se croisent pour aboutir à l’existence informatique de l’objet de la collection. Au sein des nouveaux classements, les liens entre informations et objets sont d’abord défaits pour rendre possible leur nouveau rattachement : l’artefact fait corps avec la fiche numérique. Parallèlement, les métiers de conservation et gestion de la documentation se confrontent autour de la création sans fin du thésaurus « catégories » d’objets. Ces échanges opèrent la recomposition d’une communauté de pratiques muséales.
L’article se penche sur la production et la manipulation de dispositifs de gestion de l’accumulation. Il entre dans les infrastructures conçues pour mettre en ordre et rendre accessible l’accumulation des connaissances par la clé de la matérialité et s’interroge sur les productions, configurations et manipulations in situ d’informations, de données, d’inscriptions. Les problèmes et enjeux de ces dispositifs se situent à la croisée de plusieurs champs de réflexion, notamment la taxinomie, la fabrication des données et de la production de standards, l’écologie des infrastructures informationnelles et la coopération entre communautés de pratique. Les technologies de l’information et de la communication sur laquelle reposent les économies de la société de l’information se fondent sur des équipements qui amplifient la diffusion, le stockage et l’organisation d’agrégats hétéroclites. Ces équipements sont des structures invisibles mais éminemment politiques de la production des connaissances. La perspective adoptée hérite de l’anthropologie des cultures matérielles autant que de l’attention portée aux ontologies et aux modes de présence des humains et non humains. Il s’agit de réinscrire les techniques numériques de stockage des connaissances dans un ensemble de pratiques de gestion documentaire dont la liste, l’inventaire ou le catalogue, la fiche ou l’imprimé. Ces technologies numériques sont dotées d’une matérialité dont il s’agit d’explorer les propriétés et les spécificités. Elles constituent des lieux d’exercice de politiques de contrôle en même temps que les données constituent des environnements dotés d’une texture spécifique qui agissent en retour sur les structures normatives dans lesquels elles s’inscrivent.
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