© École des hautes études en sciences sociales N SOUFFLE froid-psuchron : tel aura été, en de vaines étreintes amoureuses, en de fameux embrassements, l'inquiétante ou décevante volupté de l'image. Tel serait, pour l'Occident, l'image elle-même, à la fois confisquée à l'ombre (skia) d'un amant dans la perspective du départ, et donnée pour l'ombre de l'être disparu, ce fantôme nommé justement psuché. Telle : une présence conciliée à l'absence. C'est ce pouvoir d'évocation de « l'ailleurs dans ce qui est sous les yeux » comme l'indiquait Jean-Pierre Vernant 1 ; ce sont les modalités anthropologiques de cette « g a g e u re » de l'image qui constituent le sujet et la trame du beau livre de Maurizio Bettini, Il Ritratto dell' a m a n t e. Là, avant tout, une écriture est à l' oe u v re, patiente et précise, invitant au plaisir doux-amer. Po rtrait, donc, de l'amant autant que de l'amante (le français n'a pas les moye n s de l' é q u i voque), en substitution de l'un ou à sa ressemblance, comme oeuvre ou consolation de l' a u t re, selon que le génitif adopte une valeur subjective ou object i ve. Autant d' h i s t o i res ici gagées : en somme des combinaisons sémantiques q u' o f f re le titre, une forme élémentaire émerge, une « h i s t o i re fondamentale » s'impose, qui lie, sous l'impulsion du p o t h o s (prise mélancolique du désir), « d e u x amants et une image ». On suivra alors, d'un motif, d'un récit et d'une source à l' a u t re, les transformations de cette « h i s t o i re fondamentale »-dont le pre m i e r mérite du livre est de montre r, tout du long, qu'elle constitue une s t ru c t u re prof o n d e de la pensée mytho-poétique grecque et latine-jusqu'en certains de ces avatars modernes. Et l'on se demandera avec l' a u t e u r, « d e vant l' é c h e veau de combinaisons qui se crée sous nos ye u x : sommes-nous en train de parler d' e l l e (/de lui) ou de son port r a i t ? » (p. 7). L'enquête s' o u v re dans l'atelier du potier Butadès de Syc i o n e ; l' « h i s t o i re fondam e n t a l e », c'est d' a b o rd cette o r i g i n e postulée de l' a rt du portrait comme de la plas