L’enseignement de la morale, du civisme ou de la citoyenneté à l’école est en partie gouverné par le curriculum formel et les débats d’idées qui cherchent à l’orienter. Mais quelle morale l’école enseigne-t-elle en réalité, dans l’ordinaire de ses pratiques et les plis du curriculum caché ? Une synthèse des recherches menées sur vingt ans dans l’enseignement obligatoire de Suisse romande montre que l’ethos localement dominant est d’abord celui de la responsabilité des élèves et de la cohésion des classes dans un cadre de travail adapté. Ailleurs, dans chaque établissement, la confiance et la complémentarité sont les composantes valorisées d’un dialogue apaisé. Savoir vivre ensemble est un objectif du plan d’études, mais aussi la vertu immédiate du convivialisme ainsi pratiqué. Cette configuration est-elle propre à la Suisse ou illustre-t-elle une tension démocratique entre deux perspectives : décréter le bien commun en surplomb ou le chercher collectivement par la contradiction ?